Le juste est mis à nu - Clés de lecture

Job

Qui est Job ? Son nom signifierait (d’après sa racine hébraïque)  » celui qui est traité en ennemi  » ou  » celui qui est objet de persécution « . Job peut donc être tout un chacun qui vit l’expérience que décrit le livre…
Mais y a-t-il seulement une figure de Job ? Si on lit le livre à qui on a donné son nom, on trouve d’abord une histoire -tel un conte oriental– qui présente Job comme un très riche propriétaire à qui arrive toute sorte de malheurs. Oui,  » il y avait une fois  » au pays de Ouç (Job 1,1) un certain Job, exemple de piété et de justice. Un peu plus tard, ce même Job (est-ce bien le même ?…) parle, hurle, crie pendant 39 chapitres son malheur.

Revenir à la page précédente
Un homme intègre et droit

L’auteur du livre qualifie Job d' » intègre et droit  » et de  » craignant Dieu et évitant le mal  » (Job chapitre 1,1). On décrit d’autres personnages de l’Ancien Testament (et du Nouveau) de manière proche. Job se trouve  » en bonne compagnie  » : Noé (Genèse 6,9), Abraham (Genèse 17,1) et Jacob (Genèse 25,27).
Le mot  » intègre  » vient d’une racine hébraïque qui évoque le fait d’être  » entier « , la perfection, tant physique que morale. La  » droiture  » qui concerne les relations envers la loi et les autres en découle. Le texte ajoute encore  » craignant Dieu et évitant le mal « . Cet ajout qui pourrait apparaître comme superflu, ne l’est pas quand on considère que l’auteur veut fortement insister sur l’irréprochabilité de Job, tant physique que sociale et religieuse. Pourquoi ? Le récit s’enracine dans la littérature de sagesse dont une idée principale est la logique de la rétribution.

Revenir à la page précédente
Il déchira son manteau et se rasa la tête

On rencontre beaucoup de rites de deuil, de repentance ou de désespoir dans l’Ancien Testament : Déchirer ses vêtements (p.ex. en Genèse 37,34, 1Samuel 4,12, 1Rois 21,27, Esaïe 37,1), se couvrir la tête de poussière ou de cendre, se faire des incisions sur le corps, jeûner, porter des habits de deuil, ne pas mettre de parfum, se coucher sur de la cendre (Esther 4,3), chanter des chants de deuil, se raser la tête (Esaïe 22,12). Certains de ces rites se retrouvent d’ailleurs chez d’autres peuples. Ainsi, les incisions sur le corps sont parfois critiquées par les auteurs des textes bibliques (p.ex. Deutéronome 14,1).

Revenir à la page précédente
J'y retournerai

La nudité dit la fragilité de la condition humaine, à la naissance comme à la mort. Ici, le mot  » sein  » est symbolique pour le séjour des morts (Voir aussi Jonas 2,3). L’être humain est créé à partir de la poussière et il redevient poussière une fois que le souffle de Dieu ne l’habite plus. La terre est vue comme une mère d’où vient l’être humain et à laquelle il retourne. On ne trouve pas ici l’espoir d’une résurrection. Tout se joue dans la vie ici-bas. C’est pourquoi d’ailleurs l’expérience du juste souffrant est aussi insupportable. Job constate ici simplement la fragilité de toute vie.

Revenir à la page précédente
Le Seigneur a donné, le Seigneur a ôté

Dans un premier temps, Job ne met pas en question le rôle de Dieu dans ce qui lui arrive. Même si les événements restent incompréhensibles, Job demeure pleinement dans la théologie de l’époque : Dieu tout puissant est responsable de tout ce qui arrive. Cette conviction s’exprime aussi ailleurs dans l’Ancien Testament. Elle est la conséquence directe du développement du monothéisme en Israël. Dans le contexte de ce qui arrive à Job, elle résonne de manière particulièrement révoltante. Elle a parfois été interprétée comme une résignation devant les faits horribles qui l’affectent. Mais à côté de l’incompréhension que l’on peut éprouver face à une telle déclaration, il ne faut pas oublier qu’elle exprime aussi la confiance de Job ( » Rien ne peut arriver dont Dieu n’ait connaissance « ). C’est cette confiance qui lui permettra justement par la suite de contester ce Dieu qu’il regarde comme responsable de ses maux.

Revenir à la page précédente
Rien d'injuste

Ce petit commentaire de l’auteur  » En tout cela, Job ne pécha pas. Il n’imputa rien d’injuste à Dieu.  » dit tout le scandale du récit. La justice de Job semble en quelque sorte dépasser celle de Dieu lui-même. Car Dieu apparaît bien comme injuste envers Job, si on considère le  » pari  » qu’il a lancé à Satan Dans la Bible, on désigne ainsi, avec une majuscule, celui qui s'oppose à Dieu. On trouve encore les noms de diable (en grec : " celui qui divise "), de Satan (traduction de l'hébreu : " celui qui accuse "), de Malin (celui qui fait le mal), etc.. En tout cas, l’auteur du texte pousse toujours plus le décalage entre d’un côté Job, exemple de justice en toute chose, et Dieu qui se montre comme étonnamment loin de ses propres prescriptions.

Revenir à la page précédente
Il frappa

De qui s’agit-il ? Dans le texte de nos Bibles, il semble évident que ce soit l’Adversaire Dans la Bible, on désigne ainsi, avec une majuscule, celui qui s'oppose à Dieu. On trouve encore les noms de diable (en grec : " celui qui divise "), de Satan (traduction de l'hébreu : " celui qui accuse "), de Malin (celui qui fait le mal), etc. car nous lisons le  » il  » à la suite du dialogue au ciel (versets 6 à 12). Toutefois le texte de ces premiers chapitres a probablement été complété par un ou plusieurs rédacteurs. Si vous lisez par exemple le v. 13 comme suite du v.12, les  » fils  » dont il est question seraient ceux de Satan ce qui ne fait pas de sens. Il semble bien que le v.13 du premier chapitre était à l’origine la suite du v.5. et que le dialogue au ciel entre Dieu et l’Adversaire a été ajouté par la suite. C’est pourquoi nos traductions choisissent de préciser de quels fils il s’agit en mettant  » les fils de Job « , alors que le texte hébreu n’a que  » ses fils « .
Qu’est-ce que cela veut dire ? La conséquence est que ce  » il  » dans un premier temps se rapportait à Dieu. C’est d’ailleurs ainsi que Job comprend les événements. Ce n’est que dans un deuxième temps, quand il était devenu inaudible d’attribuer de telles actions à Dieu face à son serviteur Job qu’on a mis en scène une deuxième figure : l’Adversaire. Ce procédé se retrouve ailleurs dans l’Ancien Testament.

Revenir à la page précédente
Un ulcère malin

Si cette maladie de la peau n’est pas mortelle, elle est pénible car elle produit des démangeaisons sur tout le corps. Comme maladie de la peau, elle est visible et coupe ainsi des autres. Le malheur ne concerne plus seulement l’entourage de Job, mais c’est lui-même qui est désormais concerné de manière visible et repoussant pour les autres.

Revenir à la page précédente
Les cendres

Comme conséquence de sa maladie Job quitte sa maison pour aller littéralement  » parmi les cendres « . Cette expression désigne un endroit impur en dehors des villages où les malades devaient se réfugier pour éviter de contaminer les autres membres de la communauté.

Revenir à la page précédente
Persister dans ton intégrité

La femme de Job entre en scène. Elle apparaît comme porte-parole de l’Adversaire. Le lecteur sait que c’est justement de cela qu’il s’agit : persister ou non dans l’intégrité qui consiste à servir Dieu  » pour rien « . La femme de Job essaie de le faire entrer dans la logique du donnant-donnant : Si Dieu ne prend pas mieux soin de toi après tout ce que tu as fait pour lui, à quoi bon croire et rester juste ?

Revenir à la page précédente
Maudis Dieu et meurs !

Dans le texte hébreu, la femme dit littéralement  » Bénis Dieu et meurs !  » Pourquoi alors traduit-on  » Maudit Dieu  » ? Les auteurs des textes de l’Ancien Testament ont toujours évité de mettre un verbe de malédiction à côté du nom de Dieu. C’est pourquoi, on ne va jamais trouver l’association de  » maudire  » avec le nom de Dieu alors que parfois c’est ce sens qu’il faut retenir.
Mais que dit la femme ? Peut-être bien qu’on peut ici retenir  » Bénis Dieu et meurs « . C’est un peu pour dire  » Bénis ce Dieu auquel tu tiens tant et meurs car c’est ce qu’Il te propose !  » Ce serait alors l’expression ou bien de l’ironie ou bien de la désillusion. Peut-on ajouter aussi que la phrase veut pousser à la révolte contre cette situation impossible et invivable ? Toutes ces différentes lectures existent.

Revenir à la page précédente
Tu parles comme une folle

La folie dans l’Ancien Testament n’est pas la maladie mentale. Le fou ou l’insensé est celui qui ne se comporte pas selon les règles de la sagesse. Il est le contre-exemple du sage. Mais il est aussi celui qui ne connaît ou qui ne reconnaît pas la présence de Dieu. Dans le Psaume 14,1 l’insensé est celui qui dit en son cœur :  » Il n’y a pas de Dieu « . C’est probablement dans ce sens que Job traite sa femme de  » folle « . Elle ne reconnaît pas que Dieu est à l’œuvre alors même que tout semble prouver le contraire. La figure de Job ici est celle du sage qui va chercher à comprendre et qui ne va pas écarter d’un revers de la main la présence de Dieu dans ses malheurs.

Revenir à la page précédente